mardi 2 août 2016

Ouverture timide d'achats des vins canadiens au Québec

En collaboration avec Frédéric Laurin et Yves Mailloux. Publié dans LeNouvelliste et la Voix de l'Est.


Dans le vin comme pour d’autres cultures, les consommateurs ont souvent un petit penchant pour les produits locaux, quand leur rapport qualité prix se compare avec celui des produits importés. Pourtant, les vins québécois et canadiens sont relativement peu présents à la SAQ. En dehors de notre monopole, comment mettre la main sur les bons produits du Québec et du Canada ?

Pour les vins du Québec, le gouvernement vient de permettre aux épiceries et aux dépanneurs de vendre des vins locaux sans passer par la SAQ, et surtout sans la majoration moyenne de 135% qu’elle impose normalement. C’est déjà une grande avancée, même si cette mesure ne concerne toujours pas les autres alcools du terroir.

Pour les vins produits ailleurs au Canada, on retrouve maintenant une offre surprenante, tant en Colombie-Britannique qu’en Ontario, qui comptent respectivement 320 et 240 producteurs, lesquels produisent au total plusieurs milliers de vins. Or, la SAQ n’offre que 60 et 41 références provenant de ces provinces, et encore sporadiquement. Au nom de quoi le consommateur québécois ne pourrait-il pas avoir accès aux autres produits ? 

Bonne nouvelle, les gouvernements du Québec, de l’Ontario et de la Colombie-Britannique viennent d’annoncer qu’elles permettront aux résidents de leur province de commander par internet des vins produits dans les deux autres. Ainsi, les Québécois pourront se faire livrer du vin ontarien à une succursale SAQ ou par la poste à leur domicile.

Mais attention, cette ouverture concerne uniquement les vins produits dans ces provinces, pas les vins importés. Impossible donc de commander à la LCBO un produit importé, simplement pour économiser par rapport au prix demandé à la SAQ.

Les vins canadiens auxquels nous aurons accès auront subi la majoration du monopole provincial dans leur province d’origine. Les commandes placées directement auprès des producteurs viticoles demeurent interdites. Il n’y a donc pas d’aubaine en vue pour les consommateurs.

Du point de vue des viticulteurs québécois, l’entente entre les trois provinces représente tout de même une bonne nouvelle puisqu’ils pourront accroître leur marché dans les autres provinces. 

Plusieurs points restent néanmoins à éclaircir. Nous ne savons pas, par exemple, s’il y aura une limite sur la quantité qu’un consommateur peut commander. Nous ignorons si la SAQ imposera une majoration par-dessus celle de la LCBO.

Enfin l’entente tripartite n’inclut pas les autres alcools, comme les spiritueux.

Tout de même, en augmentant la diversité de l’offre, cette entente représente pour les consommateurs un pas dans la bonne direction, quoique timide. En effet, il est toujours interdit pour un Québécois d’acheter en Ontario plus de 12 bouteilles de 750 ml. De plus, il doit les acheter en personne; les commandes livrées par un tiers sont interdites. Tel est l’effet pratique du monopole de la SAQ sur l’importation et la distribution au gros.

Nous sommes donc loin d’un marché commun canadien, tel que celui établi en principe dans la Constitution canadienne (article 121). Le véritable test arrivera quand la Cour suprême se prononcera en appel du jugement Comeau. Dans cette affaire, un résident du Nouveau-Brunswick a été acquitté par le tribunal de première instance de l’accusation d’avoir importé du Québec plus que la quantité d’alcool permise. Si la Cour suprême confirme l’acquittement, un Québécois qui achète en Ontario pourrait enfin avoir autant de droits qu’un Allemand Berlinois qui achète son vin à Munich ou en France.

lundi 25 juillet 2016

Soak the Young (Faisons payer les jeunes)



Publié dans TheGazette, le 25 juillet 2016.

The labour dispute at Canada Post offers a telling example of how boomers are shifting the burden of their financial woes to the young. 

In the current round of bargaining with the Canadian Union of Postal Workers, Canada Post Corporation (CPC) is proposing that future postal workers ‑ those to be hired from day one of the next collective bargaining agreement ‑ get an inferior, defined contribution pension plan, whereas current workers would keep their defined benefit plan. 

As usual, management is asking for concessions while the union is trying to make some gains. This is normal. What is striking is that compensation rollbacks, should they occur, would be borne not by all CPC workers, but primarily by new hires. 

You might think, if concessions have to be made, their cost should be borne by the existing workforce. If compensation for posties is greater than what is observed in the job market for positions requiring comparable skills, you might think that current employees, who actually benefit from this premium, might legitimately also be those called upon to shoulder the burden of adjusting to market realities. You might think that a new hire, typically a young man or woman in their twenties or thirties, with a fresh mortgage or a burgeoning family, might need the money more than a fifty-something empty-nester with a paid-off mortgage. Not so. Nowadays, according to some twisted interpretation of intergenerational solidarity, it appears that it is the young, not the old, who are asked to bear the brunt. 

Humans and animals are biologically programmed to protect their young ‑ the future of the species ‑ before saving their elders. But in our ageing society, elders are offloading to the young the burden of adjusting to market conditions. In the context of collective bargaining, this practice has been termed “orphan clause”, because younger workers cannot rely on the protection of their elder colleagues. 

Orphan clauses establish two tiers of workers, performing the same work, with the same skill sets, at the same levels of experience. But the bottom tier, usually Millennials, get less wages or benefits than the top tier only because they were hired after, rather than before the moment the orphan clause was established.
Do you believe in equal pay for equal work? Labour standards, as well as the Charter of rights, already prohibit wage discrimination based on gender, race and age. What about date of hire? Barring the unlikely event that new hires are not generally younger than the existing workforce, discrimination according to date of hire is a systemic form of discrimination based on age.

How do orphan clauses occur? 
In collective bargaining, management and unions each defend the interests of their constituency: shareholders and workers. Future hires are outside union membership during bargaining, and so cannot be heard at the bargaining table. Some employers look for expedient ways to cut costs, irrespective of ethics. They push for two-tier systems, in wages or benefits, understanding this is the line of least resistance by unions. 

Usually, unions initially resist such proposals. But at the end of the day, they often prefer to sacrifice new hires than give ground on something that impacts their existing base. 

The labour code is a device designed to balance the strengths of management and unions, and thereby achieve fairly bargained outcomes. The device fails when both parties agree to shift the burden of cost cutting to a third party ‑ future hires – that is absent from the bargaining table. Legislative action is therefore warranted to correct this failure.  

Orphan clauses on wages are already prohibited in Quebec’s labour standards law. CPC could argue that federal law contains no such provision, neither for wages nor benefits. It could also argue that orphan clauses are not new. Still, the Government of Canada has a fiduciary duty to younger workers unable to fend for themselves within the framework of collective bargaining, as established by federal law. CPC reports to Public Services Minister Judy Foote. Pursuant to its fiduciary duty, the government could instruct CPC to pursue cost-cutting by other means than by shifting its burden to youth. 

Politicians of all stripes love to speak of their commitment to youth, hand on heart. But talk is cheap. If the Trudeau Government allows its largest Crown Corporation to balance its books by soaking the young, Millennials might take note.

jeudi 2 juin 2016

Monopole Inc. : le maintien du monopole de la SAQ n'est pas dans l'intérêt des Québécois


Publication aujourd'hui de notre étude sur les inconvénients du monopole de la SAQ sur le commerce de vins et spiritueux, réalisée en collaboration avec l'économiste Frédéric Laurin et l'expert en vins Yves Mailloux.

Télécharger l'étude (pdf)
Article de Francis Vailles dans LaPresse
Article connexe de Marie-Claude Lortie dans LaPresse
Article de Pierre Couture dans le JdeM et le JdeQ
Entrevue radio au FM93
Communiqué de presse sur CNW

Extrait #1: "À  l’heure  des  restrictions  budgétaires,  il  importe  d’exposer  au  public  comment  le  système monopolistique actuel ne sert en réalité que les intérêts d’un petit nombre de parties prenantes.  Une démonopolisation du  commerce des vins et spiritueux  permettrait des économies à la fois sur le coût des produits et sur le coût de leur distribution."


Extrait #2: Le graphique suivant montre le ratio des charges d’exploitation sur les ventes nettes sur deux décennies, calculé à partir des données des rapports annuels de la SAQ. Pendant cette période, de 1996 à 2015, la SAQ a modifié au moins quatre fois ses méthodes comptables, de sorte que le graphique présente cinq courbes, chacune correspondant à une méthode comptable en vigueur pendant une au plusieurs années. Le portrait qui s’en dégage est sans équivoque : peu importe la méthode comptable retenue, le ratio des charges d’exploitation sur les ventes nettes s’est détérioré jusqu’à un somment en 2005, puis est redescendu au niveau auquel il se situait au milieu des années 1990.  Pourtant, à quatre reprises, notamment à l’occasion de sa réplique à la commission Robillard en août 2015, la SAQ s’est vantée d’avoir amélioré son efficience : « L’efficience organisationnelle de la SAQ s’est aussi grandement améliorée. En 2005, il en coûtait 25 cents pour générer 1 $ de ventes, il en coûte aujourd’hui moins de 19 cents ». Au sens strict, cette affirmation est vraie, mais en choisissant l’exercice 2005 comme point de comparaison, la SAQ crée une illusion d’amélioration.