Paru dans Les Affaires, le 21 juillet 2007, p. 14.
Un sondage Léger Marketing réalisé récemment pour le Journal de Montréal nous apprenait que les deux tiers (67%) des Québécois interrogés sont plutôt favorables à ce que le gouvernement réserve une plus grande place au secteur privé dans les services de santé. Loin de faire peur aux Québécois, une telle perspective est maintenant appuyée par la majorité.
Mais qui devrait payer pour ces services obtenus dans le secteur privé? Près d’un Québécois sur cinq (19%) estime qu’ils devraient être financés en totalité par le gouvernement du Québec, mais le quart croit au contraire que celui-ci ne devrait aucunement les financer. Entre ces deux pôles, la moitié des répondants (53%) dit qu’ils pourraient être payés en partie par les fonds publics. Examinons les trois modèles.
Le premier est celui de la sous-traitance. Rien de bien révolutionnaire: le médecin qui nous reçoit dans son cabinet privé peut être considéré comme un sous-traitant de l’État, par opposition à celui qui travaille en hôpital ou en CLSC. Le gouvernement parle de faire davantage appel au privé pour une série d’interventions chirurgicales mineures. L’avantage? La sous-traitance permet de faire jouer la concurrence entre les fournisseurs, d’où des gains d’efficacité.
La deuxième solution consiste à faciliter le développement d’une offre strictement privée de services de santé, qui sont par ailleurs couverts par le régime d’assurance public. Actuellement, ce sont surtout les 131 médecins désengagés de la Régie de l’assurance maladie du Québec (RAMQ), sur quelque 19 000, qui offrent des services assurés contre rémunération privée. Pour accroître l’offre privée, le gouvernement devrait permettre aux médecins participants à la RAMQ de travailler aussi dans le privé, une fois accompli leur service public. Il devrait aussi autoriser des hôpitaux - avec hébergement - privés. Si un entrepreneur veut s’y essayer, pourquoi pas?
Il existe déjà une offre privée dans d’autres secteurs occupés par l’État, notamment en éducation et dans les services de garde. Pourquoi pas en santé ? Pourquoi pas une université privée se finançant sans subventions directes de l’État, par des droits de scolarité librement fixés, comme cela se fait ailleurs au Canada?
La troisième option consiste à ce que l’État finance, en partie seulement, des services de santé obtenus dans le privé. Nous ne parlons pas ici de ticket modérateur. Nous pensons plutôt à un modèle où le gouvernement paie le coût d’un service de base obtenu dans le privé: une consultation, une intervention chirurgicale ou un traitement pharmacologique. À son choix, le patient paie un supplément pour obtenir un service ayant plus de valeur à ses yeux: une prothèse de qualité supérieure, un médicament dernier cri plus coûteux, une chambre d’hôpital plus confortable. Le financement public pourrait prendre la forme d’un bon donnant droit au service de base complet. Ce dernier doit être clairement défini, car le flou favorise la surfacturation sans valeur additionnelle pour le patient.
En finançant ainsi la demande plutôt que l’offre, le gouvernement favoriserait l’émergence d’un marché portant sur les attributs des services qui en accroissent la valeur. Les prix y seraient fixés librement et la concurrence jouerait son rôle de régulateur.
Les Québécois sont prêts à essayer de nouveaux modèles. Leurs dirigeants le sont-ils?