Paru dans Le Soleil, le 11 avril 2009, Cyberpresse
Paul Daniel Muller et Dominique Vachon
Selon le dernier budget, l'économie québécoise reculerait de 1,2% en 2009, moins que plusieurs provinces canadiennes et pays industrialisés. Mais voilà que le gouvernement propose un plan de stimulation équivalant à 7,6% du PIB sur trois ans. C'est plus que ceux de tous les États auxquels il se compare. Surréagir ainsi, c'est renoncer au principe de responsabilité fiscale auquel Québec a adhéré avec la Loi sur l'équilibre budgétaire.
Cette loi oblige le gouvernement à résorber un déficit par des excédents, afin d'en arriver à un solde nul cumulé sur cinq ans. Le budget 2009-2010 contrevient à la loi: en 2013-2014, on ne ferait que revenir au déficit zéro. Le principe de l'équilibre budgétaire était donc bon jusqu'à ce qu'il contraigne le gouvernement à faire des choix désagréables. Placé devant cette responsabilité, il préfère changer les règles en modifiant la loi.
En 2013-2014, année où il faudra trouver 3,8 milliards $ pour joindre les deux bouts, le Québec aura déjà probablement vécu une autre élection générale. L'essentiel de l'effort pour revenir à l'équilibre commence en 2011, dans la seconde moitié du mandat libéral. Pas très réaliste.
Pour retrouver l'équilibre, le budget propose trois mesures pour hausser les revenus. Mais du côté des dépenses, le silence est assourdissant. La limitation à 3,2% de la croissance des dépenses (contre 4,6% depuis six ans), exigera près d'un milliard $ de compressions à partir de 2010 et chaque année par la suite. Des choix difficiles en perspective, dont le budget ne dit mot.
Accoutumance à l'endettement
Les dernières années de forte croissance auraient dû nous donner le courage de revoir le rôle de l'État. L'ancien haut-fonctionnaire Denis Bédard, déplorant récemment notre accoutumance à l'endettement, pointait l'incapacité des gouvernements à prendre des décisions sur le niveau des services. Nous sommes bons pour ajouter de nouveaux programmes qui répondent au besoin du jour, mais sommes incapables d'en élaguer. Il nous appartient à tous d'aider le gouvernement à identifier les programmes non essentiels. Voici deux exemples.
1) À l'occasion du décès d'un travailleur ou d'un retraité, la Régie des rentes verse 2500$ à la famille du défunt, jusqu'à concurrence des frais funéraires. Or, plus de 80% des Québécois sont maintenant assurés sur la vie. Ce programme, qui coûte 100 millions $ par année, est devenu une subvention déguisée à l'industrie des services funéraires. Nous pourrions nous en passer. Pour les familles démunies, l'État pourrait toujours assumer ce coût.
2) En éducation, nous devrions supprimer tout le palier électif des commissions scolaires. Les commissaires se dévouent bien à leur tâche, mais les questions importantes en éducation se décident ailleurs. Avec 8% de participation aux élections, le jeu de la démocratie scolaire n'en vaut pas la chandelle. Nous pourrions aussi financer l'école publique entièrement par subvention, économisant ainsi le coût de percevoir de la taxe scolaire. Ces gestes permettraient d'économiser un «petit» vingt millions $, mais c'est autant d'argent qui pourrait être réalloué à la lutte au décrochage.
L'heure n'est plus aux voeux pieux face au problème de l'endettement; c'est le moment de prendre nos responsabilités.